Les Taxis à Vaudreuil-Dorion tout autant touchés | VIVA MÉDIA Skip to main content

Les chauffeurs de taxi ont fait la une à plusieurs reprises dans les dernières semaines. Le désespoir est au rendez-vous, les grèves augmentent en intensité, le gouvernement semble implacable, la population est divisée, mais qu’en est-il pour Vaudreuil-Soulanges?

Bien que la majorité des manifestations organisées par les chauffeurs de taxi se déroulent dans la métropole, les chauffeurs de taxi de notre région sont tout autant touchés par ce projet de loi 17 qui prévoit l’abolition des permis de taxis et la fin des territoires de desserte. En d’autres mots, ce projet de loi laisse la porte ouverte aux nouveaux joueurs sur le marché qui offre des courses à prix variables et qui sont commandées par l’entremise d’une application mobile (comme UBER par exemple).

Une industrie qui risque le chaos

Cela peut sembler banal, mais l’industrie des taxis au Québec faisait partie des systèmes les plus encadrés au niveau international le projet de loi viendrait inverser cette situation. L’encadrement avait pour but d’éviter les abus et les situations possibles d’injustices. Un exemple concret est celui de l’achat des licences. L’achat de licences de taxis pouvait varier en prix selon les régions, mais dans le système en place, un propriétaire ne pouvait posséder plus de vingt permis de taxi afin de favoriser le propriétaire artisan. Avec le projet de loi 17, c’est tout à fait le contraire, les joueurs sont maintenant des multinationales. Le but du système en place était aussi d’assurer un équilibre entre l’intérêt du public et la rentabilité des propriétaires de taxi. Cela se concrétisait par des obligations concrètes pour les chauffeurs : permis de classe 4c, examen médical, formation en transport des personnes a mobilité réduite, vérification des antécédents criminels aux 2 ans, vérifications mécaniques via un mandataire certifié par la SAAQ et non un garage quelconque, etc. Le nouveau projet de loi laisse beaucoup de ces points dans l’ombre.

« C’est difficile à comprendre le système d’achat et de valeur des licences, affirme Jean-François Tremblay, président de Taxi VS et Taxi Soulanges et cofondateur de l’ATRQ (Association des Taxis des Régions du Québec). Pour simplifier, c’est un peu comme l’immobilier, plus on se rapproche de Montréal et plus les prix augmentent. À titre d’exemple, Vaudreuil-Dorion étant très proche de Montréal, les prix ont augmenté au fil du développement de la ville. Mes dernières licences m’ont coûté environ 160 000 $. »

Des licences en guise de fonds de pension

Ces licences achetées par les chauffeurs de taxi étaient vues comme des investissements pour le futur. En effet, à défaut de fonds de retraite, ces travailleurs comptaient sur la revente des licences pour être capables d’assurer leur retraite.

« Il faut comprendre que la majorité des chauffeurs de taxi viennent de l’étranger, continue Jean-François. Ils ont connu des réalités difficiles et sont venus au Canada pour y trouver une vie meilleure. En fait, le monde du taxi est un bel exemple de réussite de l’intégration des immigrants et une belle réalité multiculturelle. Toutefois, ces derniers ont acheté des licences de taxis pour assurer leurs vieux jours et avec ce nouveau projet de loi, ils vont tout perdre. »

Rappelons que l’arrivée d’UBER au Canada avait déjà affecté le marché des taxis. La valeur estimée des permis avant l’arrivée d’UBER était d’environ 1,4 milliard, ils en sont maintenant à environ 700 millions. Certes, après avoir pris des décisions sur cette nouvelle réalité, le gouvernement avait donné des compensations, mais celles-ci étaient réparties selon les régions et des évaluations du marché.

De minces compensations

« Dans mon cas, la compensation reçue l’année passée était d’environ 7800 $ par licence, ajoute M. Tremblay. Lorsque la licence coûte 160 000 $, ce n’est pas grand-chose. Le ministre des Transports, François Bonnardel, parle maintenant de compensations avec une enveloppe de 500 millions de dollars, mais la moitié de cette somme a déjà été distribuée l’année passée. Les plus compensés sont ceux de la métropole. Pour nous, il s’agit d’un autre 7800 $ seulement. Il y a des chauffeurs qui, à Sherbrooke, ont payé leur licence plus de 230 000 $ et reçoivent à peine 1000 $. Ceux qui sont le plus compensés, ce sont ceux qui sont les plus touchés par UBER. »

Pour le propriétaire vaudreuillois, les frustrations sont multiples et le sentiment d’abandon des autorités gouvernemental et local est tout autant exaspérant. Il conclut en ajoutant : « Ce qui est encore plus frustrant c’est de voir qu’en tant que chauffeur de taxi, nous participons à l’économie locale : l’achat de l’essence, les repas, les réparations mécaniques, achat de voitures, etc. En ouvrant la porte aux nouvelles industries par le web, nous envoyons notre argent à l’étranger. Pour mes industries, il s’agit d’une cinquantaine d’emplois à temps plein et d’une autre cinquantaine à temps partiel qui sont en jeu. »

Nicola Di Narzo

Journaliste

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