Depuis un certain temps, les élus ne l’ont pas facile au Québec. Que ce soit au niveau municipal, provincial ou fédéral, certains doivent composer avec des messages haineux, de l’intimidation et même des menaces de mort.
L’intimidation et l’agressivité envers les élus ne datent pas d’hier. (Photothèque)
Pour tenter de remédier à la situation, l’Union des municipalités du Québec (UMQ) a lancé dernièrement une campagne pour mettre un terme à l’intimidation et à l’agressivité de certains citoyens à l’égard des élus. Le questionnement est de mise. Qui voudra se présenter en politique si la situation perdure.
L’intimidation et l’agressivité envers les élus ne datent pas d’hier. Patrick Bousez, maire de Rivière-Beaudette et préfet de la MRC de Vaudreuil-Soulanges, explique que lors de ses premiers pas en politique municipale, qu’il était fréquent que les assemblés se déroulaient en présence des policiers.
« En 2008, il y avait une présence policière à chaque assemblée à Rivière-Beaudette, confirme M. Bousez. Les citoyens étaient nombreux pour assister aux réunions. Dès qu’un point ne faisait pas l’affaire, ils nous le faisaient savoir. Les menaces fusaient de toute part. C’était intimidant. »
Internet
L’apparition des réseaux sociaux n’a pas aidé la vie des élus. Selon M. Bousez, les gens ne réalisent pas toujours la portée que peut avoir une publication et comment cette dernière peut être perçue. « Il y a 99 % des gens qui ne feront jamais ce qu’ils écrivent, mais il n’y a pas de chance à prendre », conclut M. Bousez.
Le maire de Terrasse-Vaudreuil, Michel Bourdeau, a déjà été victime d’intimidation. Les menaces l’ont même suivi à l’extérieur de l’hôtel de ville. Des messages haineux sur internet en passant par des déchets qui ont été jetés sur son terrain, M. Bourdeau sait très bien ce à quoi ressemble l’intimidation des élus.
« En septembre 2020, j’ai déposé une plainte à la Sûreté du Québec, indique le maire de Terrasse-Vaudreuil. Ce n’était pas la première fois que l’individu tentait de m’intimider, mais à cette occasion, il est allé trop loin. Pendant l’assemblée, il me criait des bêtises, il s’amusait à couper la parole aux membres du conseil et à la fin, il est venu à quelques centimètres de moi pour m’intimider. »
Michel Bourdeau confirme qu’un individu a également passé pratiquement un an à jeter des déchets sur son terrain. D’ailleurs, il a fait installer des caméras de surveillance sur son terrain. « J’aime la politique, assure M, Bourdeau. Cependant, il m’arrive d’avoir des remises en question. Une chance que ce sont des gestes isolés, que ce n’est pas la majorité des gens qui agissent ainsi. L’intimidation aux élus fait en sorte que des gens délaissent la politique. »
Les élues
La gent féminine est loin de l’avoir plus facile en politique. La députée de Vaudreuil, Marie-Claude Nichols a été directement menacée en septembre dernier par un homme de 34 ans. D’ailleurs, l’individu a été arrêté et il est formellement accusé d’avoir conseillé une infraction qui n’est pas commise. L’individu menaçait de faire exploser la résidence de la députée. Évidemment, Marie-Claude Nichols a craint pour sa sécurité et pour celle de sa famille.
Pour Mme Nichols, les menaces faites par l’accusé devaient être dénoncées. En entrevue avec VIVA-MÉDIA, Marie-Claude Nichols confiait alors qu’elle ne pouvait pas passer ce comportement sous silence.
La mairesse de Notre-Dame-de-L’Île-Perrot, Danie Deschênes, n’a pas été épargnée par les menaces et les paroles déplacées. Selon Mme Deschênes, les gens ont tendance à oublier que les élus sont avant tout des humains.
« Une grande partie de l’intimidation provient d’internet, dit Mme Deschênes. Depuis un certain temps, je remarque que ce sont d’autres utilisateurs qui interviennent pour dirent à la personne qui a écrit le commentaire déplacé que ce genre de propos est inacceptable. »
Danie Deschênes confirme avoir déjà reçu des commentaires sexistes. « On finit par se faire une carapace et c’est souvent les mêmes personnes qui font ce genre de commentaire. Effectivement, je me suis déjà fait dire que je devrais retourner à mes chaudrons plutôt que de faire de la politique. »
Ce qu’en dit la loi
Le procureur en chef de l’ouest du Québec, Me Pierre-Olivier Gagnon confirme qu’il n’y a pas de différence au niveau des menaces faites via les réseaux sociaux et celles faites en personne ou par téléphone.
« C’est le mode d’enquête qui est différent, souligne Me Gagnon. C’est la même chose pour ce qu’on appelle la cyberintimidation, il s’agit en fait de harcèlement criminel, mais fait via les réseaux sociaux. Les peines se déterminent comme tous les autres dossiers similaires, selon les facteurs aggravants et atténuants présents dans la preuve. Enfin, tous ces crimes de menaces de violence ou intimidations se doivent d’être dénoncés dans une société comme la nôtre et ne doivent pas être tolérés par celle-ci. »