Les conclusions d’une enquête de la Commission municipale du Québec (CMQ) faite par la Direction des enquêtes et des poursuites en intégrité municipale (DEPIM), à l’égard de la Municipalité de Godmanchester sont catégoriques. Il est question de cas de contravention à la loi et de mauvaise gestion des élus.
Selon le rapport, le présent dossier met en relief des conduites qui se démarquent par leur répétitivité, leur gravité, leur caractère généralisé et le préjudice sérieux causé à la municipalité. (Photo Facebook)
L’enquête, dont le rapport a été publié le 23 mars 2023, a pris naissance à la suite de plusieurs divulgations laissant présager qu’un acte répréhensible avait été commis. Afin d’enquêter, la DEPIM a obtenu des documents et la version des faits de certains témoins.
Dans le rapport, il est possible d’apprendre que depuis 2020 et de manière plus soutenue suivant les élections de novembre 2021, le climat de travail s’est sérieusement dégradé au sein de la Municipalité de Godmanchester. Cette situation tire son origine de la gestion de la performance de la direction générale entreprise par certains membres du conseil et principalement par le maire. Ce dernier se déclarant insatisfait depuis plusieurs années de la direction générale et avoir trouvé appui auprès de nouveaux membres du conseil.
Toujours selon document, le maire Pierre Poirier précise que des élus sont membres de comités constitués par le conseil et qu’ils ne feraient que s’informer auprès d’employés. M. Poirier souligne qu’en raison de l’ampleur de la situation avec la direction générale, il a délégué certains attributs de son pouvoir de contrôle et de surveillance à des conseillers. Or, la délégation de ce pouvoir n’est pas permise.
Nouvel employé
Difficile de passer sous silence l’arrivée en poste d’un nouvel inspecteur municipal dont le contrat stipule qu’il ne sera pas en contact avec la direction générale et qu’il n’aura pas à rendre compte à celle-ci puisque les deux auraient vécu une mauvaise expérience. L’entente entre le maire et cet inspecteur ne respecte pas le Code municipal. De plus, suivant le départ de la direction générale, le maire a lui-même octroyé un contrat sans qu’une résolution du conseil municipal ait été adoptée au préalable.
Achat de matériel
Tâche qui relève habituellement à la direction générale, le maire a autorisé l’achat de matériel pour la direction des travaux publics. Il justifie cette dépense en vertu du pouvoir de dépenser de la direction générale qui était pourtant inexistant à ce moment.
Dans la foulée des insatisfactions à l’égard de la direction générale, le conseil a confié à un tiers des tâches appartenant à cette dernière, sans qu’aucune résolution ne précise les mandats confiés. La commission note à ce titre la sous-traitance de la rédaction de procès-verbaux, de résolutions, de projets de règlements et de règlements de même que la sous-traitance de l’analyse du système de classement informatique de la municipalité.
Tenue dans l’ignorance
À quelques reprises la directrice générale a été tenue dans l’ignorance par les élus. C’est le cas pour le travail exécuté par un professionnel qui se présente tantôt comme bachelier en droit, tantôt comme avocat de formation. Bien que celui-ci ne soit pas membre du Barreau du Québec, certains membres du conseil, dont le maire, croyaient qu’il l’était. Le maire confirme avoir consulté directement le tiers, lui avoir confié différents mandats et avoir supervisé directement l’exécution de ceux-ci. En outre, l’enquête démontre que la direction générale a été tenue dans l’ignorance quant à bon nombre de mandats réalisés par le tiers, ayant essentiellement comme information que celui-ci était mandaté pour l’aider.
En plus d’ignorer complètement l’inadéquation de la conduite du tiers envers la direction générale, le conseil réprimandera officiellement cette dernière par la remise d’une lettre par le maire, entre autres pour son « entêtement à ne pas collaborer » avec le tiers. Or, la lettre de réprimande signée par le maire va au-delà de ce que prévoit la résolution. En outre, la lettre indique qu’il s’agit d’une deuxième réprimande adressée à la direction générale, alors qu’aucune autre résolution n’a été prise à l’effet de lui remettre une première.
Notons qu’au moment de l’enquête et du dépôt du rapport, que la directrice générale est en arrêt de travail.
Les conclusions
Devant l’ampleur de la situation et l’enquête, la DEPIM conclut qu’un acte répréhensible a été commis à l’égard de la municipalité soit une contravention à la loi et un cas grave de mauvaise gestion. De fait, le présent dossier met en relief des conduites qui se démarquent par leur répétitivité, leur gravité, leur caractère généralisé et le préjudice sérieux causé à la municipalité. Également, dans l’état actuel de la situation, la DEPIM constate que l’organisation et l’administration municipale sont hautement fragilisées et que la saine remise en état des différents acteurs dans les rôles et responsabilités qui leur sont conférés par la loi est à risque.
Souhaitant connaitre la réaction du maire de Godmanchester à la suite du dépôt du rapport, un message a été laissé à l’hôtel de ville. Toutefois au moment de publier, aucun retour d’appel n’a eu lieu.