Les insurgés de Beauharnois : au nom de la liberté, de la reconnaissance et de la démocratie | VIVA MÉDIA Skip to main content

Au début de l’hiver 1837, des hommes chuchotent dans les chaumières de Beauharnois et ses environs tandis que des femmes font le guet devant les fenêtres. Une rébellion se prépare. Le risque est considérable, mais les patriotes sont prêts à y laisser leur vie. Pour ces hommes du peuple, la reconnaissance de leur nation, la liberté politique et la démocratie en valent le prix.

Les insurgés à Beauharnois, Bas-Canada 1838, par Katherine Jane Ellice, épouse du Seigneur des lieux et prisonnière des Patriotes.

Crédit : Bibliothèque et Archives Canada

Pour comprendre les motivations des patriotes, il faut d’abord connaitre le contexte politique et démocratique de l’époque. Pour vulgariser la situation, disons que la Chambre d’assemblée est alors composée de députés et d’un Conseil Législatif dont l’objectif est de diriger chacune des décisions en faveur de la couronne britannique. Contrairement à aujourd’hui, il n’y a pas de premier ministre. En fait, le pouvoir est entre les mains du Gouverneur et son entourage. Précisons que ces derniers ne sont pas élus par le peuple. Dans ce contexte, il est facile d’imaginer que la démocratie est une voix qu’on ne désire pas entendre.

 

À la Chambre d’assemblée, tandis que tout est contrôlé par la puissance britannique, le Parti patriote, ayant comme chef Louis-Joseph Papineau, prône des valeurs républicaines soit la liberté, l’égalité, la fraternité et laïcité. Le Parti patriote, majoritaire en Chambre dépose en 1834, les 92 résolutions. Succinctement, le document critique la division du pouvoir dans la colonie et exige un gouvernement responsable face à l’Assemblée législative. La réponse finale arrive 3 ans plus tard, par le biais des résolutions de Russell, qui rejettent leurs demandes.

 

Le soulèvement populaire

Aux quatre coins de la colonie, des assemblées publiques de soutien sont organisées, et une pétition de plus de 78 000 signatures est envoyée à Londres.

 

Au printemps 1837, des partisans du Parti patriote se réunissent partout au pays. Le surpeuplement et les mauvaises récoltes accentuent la tension déjà présente au sein de la colonie.  Le peuple se dresse alors contre le gouvernement. Une crise économique, sociale et linguistique se dessine. C’est terminé! Plus question de se faire contrôler par la puissance britannique! Un boycottage des produits anglais débute.

 

La bataille de Beauharnois

Des rébellions s’organisent, enclenchant les conflits armés entre les Patriotes et les Loyaux. La mission des camps armés formés par les Patriotes sur la rive nord et la rive sud de Montréal est de désarmer les Loyaux et de lancer des attaques simultanées, dont une, à Beauharnois.

 

Ainsi, le 3 novembre 1838, près de quatre cents rebelles, dont cent possèdent des fusils, se regroupent à Sainte-Martine. Faute d’arme à feu, les autres rebelles utilisent des outils de ferme.

 

Cette nuit-là, le groupe se déplace vers Beauharnois. Durant ce temps, deux cents personnes se joignent à eux. Le groupe se rend au manoir Ellice, où séjournent, le seigneur des lieux, son épouse, le secrétaire de ce dernier, et une douzaine de Loyaux.  Rapidement, les Patriotes désarment les occupants et les conduisent à leur fort où ils les gardent prisonniers.

 

La rumeur court alors que le vapeur Henry Brougham, rempli de soldat anglais, est en route vers Beauharnois pour assurer la protection des Loyaux et du Seigneur des lieux.

 

Les Patriotes s’emparent alors du vapeur. Parmi les passagers, ils ne trouvent que quelques soldats. La rumeur n’était pas fondée. Le Patriote Rochon Toussaint, originaire de Beauharnois, participe activement à l’opération visant à rendre inopérable le vapeur, en démontant le gouvernail. Les Patriotes conduisent les passagers capturés, auprès des autres prisonniers puis firent ensuite couler le vapeur.

 

Quelques jours plus tard, plus de 1200 Loyaux débarquent à Beauharnois. Ils s’emparent de plusieurs habitants, incendient 40 maisons et en pillent 350. Les Patriotes sont arrêtés et transférés à la prison de Montréal.

 

Condamnations

Plusieurs Patriotes issus de la région sont d’abord condamnés à la pendaison, mais voient ensuite leur peine est commuée en exil. Ils sont alors déportés en Australie. Par chance, la reine Victoria leur accordera son pardon, 4 ans plus tard, leur permettant ainsi de rentrer au pays. Après quelques années d’exil, le Patriote Toussaint Rochon revient finalement auprès de sa femme. En 1845, il devient maire de Beauharnois.

 

 

Mélanie Calvé

Journaliste

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