Accompagnée de mon conjoint, de son fils et de ma petite-fille Éléonore, je me suis frayé un chemin parmi la foule qui attendait le passage de la parade de la Saint-Jean. Nous avons trouvé une petite place près d’un vieil homme assis sur son triporteur. À peine étions-nous installés qu’il nous a abordés.
De gauche à droite : Daphné ma belle-fille de 12 ans ; ma fille Talianna-Rose nouvellement maman de la petite Éléonore ; ma fille Hanaëva ; mes petites-filles Maddy-Jane et Élianna.
Elles ont tous pris du temps à leur façon pour se créer des souvenirs tout en offrant des sourires à des milliers d’inconnus.
Le bruit ambiant, le bébé à surveiller, le bébé chien du beau-fils à contrôler : honnêtement, je n’avais pas trop la tête à la discussion.
Tandis que le vieil homme me parlait, j’ai cherché en vain une échappatoire. N’en trouvant aucune, j’ai quitté mes pensées et j’ai l’ai écouté me raconter que né en 1926, issu d’une famille de quatorze enfants, il était le dernier des sept garçons à être encore vivant. « Le Bon Dieu ne veut pas de moi », m’a-t-il dit en souriant.
Selon ses dires, la première maison à être construite sur la rue Montcalm à Salaberry-de-Valleyfield est celle que son père avait bâtie de ses propres mains. Puis, ses beaux grands yeux bleus se sont embués de larmes. « Papa n’a jamais levé la main sur aucun de nous ! Il était sévère, mais pas violent. Chez nous, ça marchait droit. On savait ce qu’on avait à faire et on était mieux de le faire. C’est loin tout ça… me voilà un vieil homme qui n’a rien d’autre à faire que de profiter de la vie. Comme aujourd’hui, à attendre la parade en vous jasant. La vie passe tellement vite. Je ne comprends pas comment ça a passé aussi vite », a-t-il ajouté, émut.
J’ai pris le temps d’écouter cet inconnu. J’ai pris le temps d’accueillir ses confidences comme s’il s’agissait d’un beau gros bouquet de marguerites fraîchement cueillies. J’ai pris le temps de partager un moment privilégié avec un homme qui a vu fleurir quatre-vingt-seize printemps. Parce qu’il a pris le temps d’entrer en relation avec moi, j’ai eu accès à un monde d’histoires. J’ai eu le privilège d’attraper quelques confidences au vent.
Puis, le char allégorique de Noël, préparé par ma fille ainée, est apparu au loin. Cette même fille qui prend le temps d’être dans deux conseils d’administration, d’être celle derrière le Grinch de Valleyfield, de prendre soin jour et nuit de cinq résidents vivant avec une déficience intellectuelle et d’être la mère de cinq enfants. Près de ma grande, ma fille de 10 ans et ma belle-fille avaient pris le temps ce jour-là d’être des lutines pour le plus grand plaisir des spectateurs. Je me suis penchée vers l’homme en lui pointant fièrement mes filles. Ma fille de vingt ans est apparue personnifiant la princesse Aurore. Tandis que je lui faisais signe de la main, son attention s’est dirigée vers deux fillettes. Elle s’est dirigée vers elles en prenant le temps de se pencher, de leur faire un câlin et de prendre la pose pour leur mère.
J’ai souri en réalisant que prendre le temps était une des clefs du bonheur. Cet été, je vous souhaite de prendre le temps de prendre le temps.